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Pourquoi les personnes qui développent le syndrome de Diogène subissent-elles un confinement perpétuel ?

Aujourd’hui, nous avons tous.tes fait.es l’expérience du confinement dû à la crise sanitaire. Nous avons été enfermés chez nous pendant plusieurs mois et il a été démontré que cet isolement a eu un impact négatif sur la population Française, et notamment sur la santé mentale de celle-ci. Des études relayées par les services publiques ont montré qu’une personne sur sept était atteinte d’un état dépressif à la suite du premier confinement. En effet, en règle générale, l’incertitude, l’inconnu et la maladie sont des facteurs engendrant de l’angoisse chez les humains. Néanmoins, la solitude subie pendant cette période et les gestes barrières ont entraîné un manque de relations sociales et de contact avec les autres. Or, il est absolument nécessaire d’entretenir des liens sociaux pour garder un équilibre sain et une stabilité psychique.

Ce constat à grande échelle permet de mieux comprendre la situation dans laquelle se trouvent les personnes atteintes du syndrome de Diogène. Même si les raisons de leur isolement sont totalement différentes, il est plus facile d’être en empathie avec quelqu’un lorsqu’on a vécu une expérience similaire. En effet, notre cerveau est composé de neurones spécifiques qui semblent jouer un rôle dans la cognition sociale et les processus affectifs. Ces neurones miroirs s’activent lorsqu’on effectue une action, mais également lorsqu’on voit quelqu’un l’effectuer ou qu’on imagine celle-ci. Ainsi, de nombreux scientifiques pensent que ces neurones agissent dans la reconnaissance et la compréhension des émotions des autres et permettent donc l’empathie.

Nous avons donc vu certaines conséquences d’un confinement périodique sur les êtres humains, mais qu’en est-il des personnes touchées par le syndrome de Diogène ? Pourquoi subissent-elles un confinement perpétuel ? Quels sont les impacts de cet isolement ?

Les recherches sur ce syndrome ont mis en évidence les différentes causes qui semblent le déclencher et nous les avons abordées dans un article précédent. Néanmoins, il est souvent difficile de comprendre les raisons de l’isolement continu des personnes atteintes par ce trouble lorsqu’on ne le vit pas personnellement. Lorsque le syndrome de Diogène se déclenche, les personnes touchées s’isolent d’elles-mêmes. En effet, c’est souvent à la suite d’un événement particulièrement marquant, comme la perte d’un proche par exemple, que celles-ci vont se renfermer et subir la solitude. Ce mécanisme de défense est le seul moyen connu par le psychisme de ces personnes pour supporter la souffrance. L’isolement n’est donc pas un choix conscient de l’individu mais bien une façon pour l’appareil psychique de survivre à ce traumatisme. Cette réaction de renfermement est notamment due à un apprentissage implicite pendant l’enfance. En effet, ces personnes ont souvent eu l’habitude lorsqu’elles étaient petites de ne pas demander d’aide et de se débrouiller seules lorsqu’il leur arrivait quelque chose. C’est donc tout à fait normal qu’elles réagissent de la même manière tout au long de leur vie et dans cette situation particulière.

Cependant, cette hyper-indépendance est néfaste puisque cela les empêche de verbaliser leur souffrance. Or, il a été démontré, par de nombreuses recherches en psychologie, qu’il est essentiel d’exprimer ses émotions pour permettre leur élaboration psychique. Autrement dit, en expliquant à quelqu’un ce que l’on vit, on peut intégrer et comprendre nos ressentis et nos sentiments. Néanmoins, il n’est pas nécessaire de parler à un psychologue pour cela, il est possible de le faire avec ses proches. Dans le cas des personnes touchées par le syndrome de Diogène, ce processus d’élaboration psychique est beaucoup plus difficile puisqu’elles sont isolées et n’ont donc pas ou très peu de relations sociales. C’est de cette manière qu’un cercle vicieux se met en place. Leur incapacité à se confier et à demander de l’aide les enferme et lorsque leur situation s’aggrave, ces personnes n’arrivent plus à en sortir. De plus, le fait de garder pour soi les choses qui nous affectent engendre une douleur psychique supplémentaire. Les diogènes ressentent très fréquemment de la honte liée à leur situation. En effet, ils ont souvent l’impression que leur souffrance est illégitime et ils minimisent leurs ressentis et leur expérience. C’est une des raisons pour lesquelles on considère régulièrement ce trouble comme un mode de vie qui a été choisi par ces personnes. Or, il est important de noter que ce syndrome n’est absolument pas un choix, au même titre que les autres troubles mentaux, et qu’il a des conséquences négatives sur tous les plans de la vie. Il impacte notamment la santé mentale, les relations sociales, l’hygiène et les finances. Ce sentiment de honte est un facteur de plus qui les empêche de demander de l’aide et les conduit à se renfermer encore davantage.

Ainsi, le confinement perpétuel et continu vécu par les personnes touchées par le syndrome de Diogène est lié à plusieurs facteurs. En effet, il est d’abord engendré par un apprentissage infantile d’hyper-indépendance qui est fréquemment une des conséquences d’un type d’attachement insecure. Cela entraîne une capacité moindre à demander et à accepter de l’aide des autres. De plus, il n’est pas rare de constater que, dans ce type de profil, le fait de ne pas réussir seul engendre un sentiment fort de honte. Cette impossibilité conduit également à la création d’une blessure narcissique, c’est-à-dire que cela impacte négativement l’estime de soi. Autrement dit, ces personnes vont avoir l’impression de ne pas être capables puisqu’elles ont l’habitude de tout gérer elles-mêmes sans avoir besoin de soutien extérieur. L’ensemble de ces émotions néfastes influence l’isolement et empêche les personnes atteintes par le syndrome de Diogène de dépasser leur souffrance. On constate donc que ce cercle vicieux est puissant et qu’il est difficile d’en sortir seul.